• -Rencontre GRFDE-MEN-MESR

    Rencontre entre le GRFDE et des membres des cabinets du Ministère de l’Éducation nationale

    et du Ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche

    Le 21 décembre 2012, une délégation du GRFDE (Groupe Reconstruire la Formation Des Enseignants) a rencontré Édouard Leroy, conseiller technique auprès de Vincent Peillon, ministre de l’Éducation nationale, chargé de la formation des enseignants (et des affaires budgétaires et des questions environnementales) et Daniel Filâtre, conseiller auprès de Geneviève Fioraso, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, en charge de la formation des enseignants (et du premier cycle, de l’orientation et de l’insertion).

    Le GRFDE était représenté par Jean-Louis Auduc (PRAG honoraire, ancien directeur-adjoint d’IUFM), Marie-France Carnus (PU), Didier Frydman (PRAG), Isabelle Peltier-Lécullée (PRCE), Marie-Albane de Suremain (MCF).

    La rencontre, prévue initialement pour une heure, à l’invitation d’Édouard Leroy et de Daniel Filâtre, s’est déroulée le vendredi 21 décembre 2012, de 14 à 16 heures. Daniel Filâtre a dû partir au bout d’1 heure 15, mais le rendez-vous s’est poursuivi avec Édouard Leroy, pendant deux heures au total.

    D’entrée, Édouard Leroy a signifié que la place du concours ne serait pas discutée, les arbitrages ayant déjà eu lieu mais que la discussion porterait sur nos inquiétudes, des questions et des points à améliorer dans le dispositif qui allait se mettre en place, les ESPE (École supérieure du professorat et de l’éducation).

    Malgré cette entrée en matière, nous avons remis à nos interlocuteurs un dossier comprenant les textes déjà publiés par le GRFDE, ainsi qu’un nouveau document évaluant le coût budgétaire comparé des différents scénarios (concours en M1, concours en M2, admissibilité en M1/admission en M2, et scénario proposé par le GRFDE : concours en fin de L3 ou après master recherche pour une partie des élèves-professeurs).

    Alors que le GRFDE souhaitait plaider en faveur des solutions qu’il préconise, l’objectif de cette rencontre, pour nos hôtes, était plutôt de convaincre notre délégation et, au-delà, notre collectif, que nous avions tort de nous inquiéter, que les textes du GRFDE étaient fondés sur des « malentendus » (le terme est revenu plusieurs fois) et que les deux ministères et notre collectif étions en réalité d’accord sur le fond. Un peu plus tard, nous avons convenu que nous partagions sans doute les mêmes objectifs généraux — la reconstruction et l’amélioration de la formation des enseignants — mais que nous avions des divergences ou des doutes sur les moyens pour y parvenir.

    L’entretien a démarré de manière très fermée, mais l’atmosphère s’est détendue par la suite.

    Les réponses d’Édouard Leroy et de Daniel Filâtre étaient pleines de bonnes intentions mais semblaient aussi empreintes de « méthode Coué » ou, au moins, d’un volontarisme optimiste : tous les acteurs collaboreront en parfaite harmonie à la réussite de la réforme, les deux ministères avancent main dans la main, les ESPE seront portées par tous les établissements universitaires de l'académie, l'harmonie règnera entre les UFR, les ESPE et les autorités de l'éducation nationale.

    Voici les points abordés, l’essentiel ayant porté sur les ESPE. 

    Les prérecrutements et les EAP (emploi d’avenir professeur)

    Édouard Leroy commence par un développement sur les EAP, dont il reconnaît qu’il ne s’agit pas de prérecrutements. L’objectif est d’atteindre 30 000 EAP (3 générations de 10 000) et de lancer rapidement le dispositif. Il sera ciblé dès janvier 2013 sur les L2, 2 500 étudiants pour le premier degré, 1 500 pour le second degré. Les académies prioritaires seront notamment Créteil, Versailles, Amiens. Quant aux disciplines, seront ciblées en particulier les maths, les lettres modernes et les langues (anglais, allemand).

    À la critique qui pourrait être faite qu’il s’agit de bourses contre du travail ne permettant pas aux bénéficiaires de s’investir complètement dans les études et la préparation des concours, il répond qu’il ne s’agit pas d’un travail « chez Mac Do » mais dans l’Éducation nationale, ce qui correspond au domaine d’intérêt des étudiants. Il nous est confirmé que le temps de travail sera de 12 h et la rémunération de 400 euros nets, ce qui est « plus important que le SMIC ».

    Le statut des ESPE

    Nous demandons ce que signifie « l’accréditation temporaire » emportant l’habilitation des diplômes. Nos questions portent sur le partage des rôles entre les différents partenaires, la place des formateurs. Nous demandons aussi pour quelles raisons le président du conseil d’ESPE serait choisi parmi les membres extérieurs nommés par le recteur… ?

    Édouard Leroy répond que les ministères ne veulent pas revenir à un modèle ancien. Les ESPE seront des composantes d’université. Il forme le vœu que les collaborations avec les UFR s’approfondissent. Les étudiants seront inscrits dans les ESPE. À une demande de précision sur ce point, Daniel Filâtre répond que cela dépendra, qu’il y aura plutôt une double inscription.

    Il faudra mettre en place des maîtres-formateurs pour le 2nd degré, développer les formateurs en temps partagé.

    Daniel Filâtre nous invite à ne pas nous inquiéter : la question de la composition du conseil d’ESPE sera réglée comme les conseils d’université. Il insiste sur le fait que la formation ne sera pas successive, que les responsabilités seront partagées entre l’ensemble des établissements universitaires d’une académie, qui porteront l’accréditation (ce ne sont pas les ESPE qui présenteront l’accréditation). Il n’y aura pas plus d’une ESPE par académie. L’État examinera les demandes d’accréditation. L’arbitrage sera fait par le CNESER... en juillet 2013.

    Il n’y aura pas de budget fléché pour l’ESPE, mais un budget global pour l’établissement universitaire. Des moyens viendront aussi du MEN. Il faut laisser les établissements « gérer au plus près des réalités ».

    Nous faisons part de fortes inquiétudes à ce sujet étant donné les expériences passées de mise en concurrence entre établissements au moment de l’intégration des IUFM et des processus de reprise de postes et moyens aux IUFM. Il ne faudrait pas avoir une vision angélique de la réalité. Il est nécessaire de mettre en place une commission de suivi pour assurer la transparence dans la prise de décision au sujet des ESPE, rendre public les critères de choix pour éviter la répétition de telles tensions ou conflits. Nous rappelons l’importance de la souffrance, ces trois dernières années, des étudiants et des personnels engagés dans la FDE.

    Nous insistons sur les délais extrêmement restreints pour mettre en place de tels projets.

    Édouard Leroy n’envisage pas que les ESPE ne puissent se mettre en place au 1er septembre 2013, mais il faudra faire preuve de souplesse pour leur développement, l’approfondissement des projets et les collaborations ultérieures. Il insiste sur le fait que cette grande réforme est menée par Vincent Peillon, ce qui justifie que le président du conseil d’ESPE fasse partie des membres extérieurs nommés par le recteur, alors que le directeur de l’ESPE pourra être universitaire.

    La place de la recherche

    Il y aura une initiation à la recherche dans ces masters des ESPE, mais qui ne prépareront pas au doctorat. Daniel Filâtre évoque des rapports de stage en M2 (et non des mémoires de recherche), mais considère qu’il s’agit bien d’une initiation à la recherche. Il ne sait pas comment appeler ces mémoires mais il s’agit bien de mémoires professionnels. Bien que le propos reste assez contradictoire, on comprend qu’il s’agira surtout de rapports de stage, avec soutenance. Daniel Filâtre évoque la possibilité que cela serve d’élément pour la titularisation.

    Daniel Filâtre souhaite que l’initiation à la recherche puisse se poursuivre sur les 4 semestres. Les types de recherche possibles doivent être divers, « fondamentale » ou en didactique. On devrait pouvoir solliciter les ressources de l’IFÉ (Institut français de l’éducation). Il rappelle qu’une part de la dotation ANR (Agence nationale de la recherche) est dédiée à la recherche en didactique.

    La façon dont la problématique de la recherche sera traitée dans les dossiers d’accréditation des ESPE sera un des marqueurs de l’analyse, tout comme la façon dont sera traitée la problématique du 1er degré. Un des objectifs est aussi de former les fonctionnaires-stagiaires en M2 dans les domaines qu’ils ne maîtriseraient pas.

    Les concours

    Daniel Filâtre pense qu’il n’y aura pas de bachotage en M1, car le concours n’est pas censé dupliquer le master. Le master sera conçu en fonction du référentiel des compétences des enseignants, en cours de formalisation. Dès l’admissibilité (vers avril), il y aura donc une épreuve « professionnalisante » de type didactique. Cependant, les M1 ne seront pas systématiquement en stage. Nous n’obtenons guère de précisions sur ce que signifie « épreuve didactique ». Il y aura davantage de précisions sur l’évolution de la nature des épreuves à la mi-janvier, qui doit infléchir la formation à l’opposé d’un modèle successif de formation. En même temps, tous les étudiants de master pourront se présenter aux concours, mais les lauréats seront en M2 enseignement.

    Nous insistons sur la nécessité de prendre en compte les différents types de métier de l’enseignement et de ne pas négliger l’enseignement technique et professionnel. Un point sur lequel les ministères reconnaissent qu’ils doivent encore avancer.

    Le projet de loi sera déposé le 23 janvier. Le gouvernement n’utilisera pas une procédure d’urgence (NB du GRFDE : à la différence ce qui s’est passé en 2012 avec le projet de loi Grosperrin). Il faudra prendre le temps du débat. Le vote de la loi est prévu en avril-mai.

    Le HCE est appelé à disparaître.

    Au-delà des déclarations de collaboration étroite entre les deux ministères, nous avons l’impression d’une entente assez superficielle.

    Édouard Leroy propose de revoir le GRFDE en janvier.

    En partant, nous suggérons à nouveau de lire les documents fournis par le GRFDE, tout particulièrement l’étude sur les coûts des divers scénarios.

    Quelques commentaires a posteriori :

    • Édouard Leroy dit que la place du concours ne sera pas discutée car les « arbitrages » ont déjà été faits en faveur d’un concours en M1. Pourtant, le projet de loi n’a pas encore été discuté à l’Assemblée…

    • Daniel Filâtre affirme qu’il n’y aura qu’une ESPE par académie et insiste sur le fait que c’est l’ensemble des établissements universitaires de l’académie qui porteront l’accréditation. Il faut sans doute remettre en perspective ces affirmations avec le projet de loi pour l’ESR du printemps qui envisage de « grandes universités », avec contractualisation « au sommet » avec l’État.

    • Sur les mémoires, les explications données par Daniel Filâtre laissent entrevoir des travaux qui ressembleront étrangement à ce qui se faisait avant la mastérisation, lors de l’année de fonctionnaire-stagiaire. Leur rôle possible dans la titularisation pose aussi la question de la nature et de la finalité de ces rapports de stage : éléments du master ou de la titularisation des FS ? Selon la réponse, cela détermine la nature du suivi et les modalités de la soutenance. Quoi qu’il en soit, on revient au dispositif de l’avant 2009, enveloppé dans un master.

    • À propos des concours, l’affirmation selon laquelle il n’y aura pas de bachotage en M1 fait peu de cas des stratégies des étudiants : ils ont intérêt à donner la priorité à la réussite des épreuves et c’est ce qu’ils feront.

    La délégation du GRFDE


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